Cet article, inspiré par le podcast très complet Time To Shift produit par Les Shifters, se penche sur une problématique aussi paradoxale que cruciale : l'empreinte carbone du secteur de la santé. En France, ce secteur est responsable de 6 à 8 % des émissions de gaz à effet de serre, un chiffre qui illustre un paradoxe troublant. Comment un système conçu pour préserver la santé humaine peut-il être à ce point climaticide, tout en étant lui-même vulnérable aux futurs chocs d’approvisionnement en énergie ?
Alors que la lutte contre le réchauffement climatique impose désormais une réduction annuelle de 5 % des émissions de gaz à effet de serre pour maintenir le réchauffement sous les 2°C, le secteur de la santé doit impérativement s'engager dans une démarche de décarbonation. Le Shift Project, avec son rapport "Décarboner la santé pour soigner durablement" (lien dans les Sources), trace la voie vers une transformation nécessaire et urgente, en éclairant les professionnels du secteur sur leur empreinte carbone et en les guidant vers des pratiques plus durables.
Introduction : pour une décarbonation résiliente du secteur de la santé
Réduire de 5 % par an les émissions de gaz à effet de serre (GES) est désormais une nécessité impérative pour maintenir le réchauffement climatique sous les 2°C. Face à cette contrainte, le Shift Project a entrepris, dès les prémices de la crise sanitaire, un travail crucial pour éclairer les professionnels de la santé sur l'empreinte carbone de leur secteur et les guider vers des pratiques plus durables.
Mais qu'entend-on exactement par « secteur de la santé » ? Cette notion englobe trois sous-secteurs principaux :
La médecine de ville : comprenant les généralistes, tous les professionnels de santé travaillant en cabinet ou au domicile des patients, les professions de la pharmacie et de la physique médicale.
Les établissements hospitaliers : qui regroupent les hôpitaux et cliniques.
Le secteur médico-social : incluant les établissements d'hébergement qui ont pour mission d'apporter un accompagnement et une prise en charge de publics "fragiles" (exemple : établissements pour personnes âgées dépendantes (EHPAD)), les structures d'accompagnement et de coordination, et les services d'aide et de soins à domicile.
Avec ses 2,5 millions de salariés, soit 9 % des actifs en France, le secteur de la santé émet entre 33 et 45 millions de tonnes équivalent CO2 chaque année, représentant ainsi 6 à 8 % des émissions nationales de GES. À l'instar de tous les autres secteurs, il doit impérativement prendre part à la réduction des émissions. Cela constitue également une opportunité de résoudre un paradoxe : en contribuant au réchauffement climatique, le secteur de la santé participe à la dégradation de la santé publique. De plus, un secteur aussi crucial pour nos vies doit sans délai réduire sa dépendance au pétrole et au gaz, d'autant plus face aux difficultés d'approvisionnement actuelles et futures. L'enjeu de résilience est majeur, car la prospérité des sociétés dépend de la santé de leur population. Pourtant, les vulnérabilités du secteur face aux chocs énergétiques et climatiques restent largement sous-estimées.
L'intérêt pour cette démarche est palpable : de nombreux professionnels de la santé ont manifesté un vif intérêt pour le rapport du Shift Project, "Décarboner la santé pour soigner durablement". Beaucoup ont participé bénévolement à son élaboration et à sa relecture. Malgré les défis auxquels notre système de soins est confronté, certaines initiatives locales émergent déjà. Plusieurs centres hospitaliers ont, par exemple, entrepris de réduire leurs déchets ou de remplacer leurs systèmes de chauffage. La Société Française d'Anesthésie et de Réanimation a, quant à elle, mené des travaux pour se passer de certains gaz anesthésiants à fort potentiel de réchauffement climatique.
Cependant, rares sont les structures de soins françaises à avoir réalisé un diagnostic carbone complet. Pour le Shift Project, cela devrait pourtant être une évidence : le secteur de la santé fournit des services, consomme des biens et des aliments, produit des déchets, mobilise des transports, construit, chauffe et refroidit des locaux. Face à une telle complexité, impossible de réduire les émissions sans une connaissance précise de leur origine.
Infographie - Décarbonation du secteur de la santé : un défi à multiples facettes
Le secteur médical, essentiel à la santé publique, est également une source significative d'émissions de gaz à effet de serre (GES). Pour mieux comprendre l'ampleur de ces émissions, les rédacteurs du rapport du Shift Project ont réparti ces dernières selon les trois périmètres d'émission bien connus, à savoir les scopes 1, 2 et 3. Cette classification permet d'identifier les sources des émissions et d'orienter les efforts de décarbonation de manière plus ciblée.
Scope 1 : Les émissions directes des structures de soins
Le scope 1 englobe les émissions directement produites par les structures de soins. Celles-ci incluent principalement le chauffage, l'utilisation des gaz médicaux, ainsi que les déplacements des véhicules de service tels que les ambulances. Ces émissions directes représentent environ 11 % du total des émissions du secteur. Il est regrettable de constater que, lors de la réalisation des bilans carbone par les structures de soins françaises, l'évaluation se limite souvent à cette consommation directe d’énergie. Cela ne représente pourtant qu'une fraction des émissions globales de CO2, ne permettant pas de saisir l'ampleur totale de l'impact climatique du secteur.
Scope 2 : Les émissions indirectes liées à la production d'énergie achetée
Le scope 2 concerne les émissions de GES associées à la production d’énergie achetée par les structures de soins, dont la combustion a lieu en amont, hors des sites de soins. En d'autres termes, cela couvre principalement les émissions liées à la consommation d'électricité. Ce périmètre représente environ 4 % des émissions totales du secteur médical. À ce stade, il est clair que seulement 15 % des émissions globales ont été comptabilisées, mettant en évidence l'importance disproportionnée du scope 3.
Scope 3 : Les émissions indirectes, en amont et en aval
Le scope 3 regroupe l'ensemble des émissions indirectes, tant en amont qu'en aval des structures de soins, mais qui sont indispensables à leur fonctionnement. Il s'agit là de la catégorie la plus vaste, représentant environ 85 % des émissions du secteur médical. Ce périmètre inclut une multitude de sources : achats de médicaments, transports des salariés et patients, alimentation, dispositifs médicaux, etc.
Les médicaments, à eux seuls, comptent pour 25 à 30 % des émissions totales du secteur. Il est important de rappeler que la majorité de la production industrielle de médicaments est réalisée à l’étranger, et que les Français restent parmi les plus gros consommateurs, même si l'écart avec les pays voisins tend à se réduire. Les dispositifs médicaux, une catégorie très large qui inclut tout, du simple pansement au scanner en passant par les prothèses, génèrent quant à eux entre 15 et 20 % des émissions du secteur.
§1 - L'impact des médicaments : un défi environnemental complexe
Laurie Marrauld, chef de projet santé au Shift Project, souligne la complexité du calcul des facteurs d'émissions liés aux médicaments. « Il existe des centaines de molécules actives, et des dizaines de milliers de spécialités médicamenteuses. Aujourd'hui, on manque de données exhaustives pour connaître précisément les facteurs d'émissions carbone associés à chaque médicament », explique-t-elle. En l’absence d’analyses de cycle de vie complètes, des approximations basées sur des équivalences monétaires suggèrent cependant une empreinte carbone importante.
Plusieurs étapes contribuent à ces émissions : la recherche et le développement, les phases d’expérimentation, la production à grande échelle, et le conditionnement, souvent sur plusieurs sites spécialisés, avant la distribution sur de longues distances. En outre, la production de ces médicaments se fait souvent dans des pays où le mix énergétique est fortement carboné, ce qui augmente considérablement leur empreinte carbone. Les normes environnementales, souvent moins strictes que celles appliquées en France, contribuent également à ce lourd bilan.
§2 - Le transport : un poids considérable dans les émissions
Les transports, qu'il s'agisse des trajets domicile-travail des professionnels de santé, des déplacements des patients et de leurs visiteurs, ou encore du transport des marchandises nécessaires aux structures de soins, représentent environ 20 % des émissions du secteur. Bien que le transport des marchandises soit un facteur important, il est encore difficile d'en quantifier précisément l'impact, en raison du manque de données disponibles.
§3 - Les autres sources d'émissions : immobilisations, alimentation et déchets
En dehors des médicaments et des dispositifs médicaux, d'autres éléments contribuent de manière significative aux émissions de GES dans le secteur médical. Les immobilisations, qui incluent l'immobilier, le mobilier, le parc informatique, ainsi que les équipements médicaux lourds tels que les IRM, représentent environ 9 % des émissions. L'alimentation, avec 6 % des émissions, et les déchets, responsables de 2 % des émissions, viennent compléter le tableau. Il est à noter que certains déchets, comme les déchets de soins à risque infectieux, ne peuvent être recyclés et sont éliminés par incinération ou traitement chimique, des méthodes qui génèrent également des émissions de GES.
La décarbonation du secteur médical est un enjeu complexe qui nécessite une approche globale, prenant en compte l'ensemble des périmètres d'émission. Les efforts doivent se concentrer sur les sources principales, notamment les médicaments, les dispositifs médicaux, et les transports, tout en n'oubliant pas les autres contributions non négligeables comme les immobilisations, l'alimentation et la gestion des déchets. La route vers une santé plus durable passe par une compréhension approfondie et une action coordonnée sur l'ensemble de ces fronts.
Les stratégies préventives et thérapeutiques pour réduire l'empreinte carbone du secteur de la santé
Face aux défis climatiques, le rapport du Shift Project propose deux approches pour réduire les émissions de CO2 dans le secteur de la santé : une approche chirurgicale ciblant les principales sources d’émissions et une approche systémique visant à améliorer l'efficacité globale du système de santé. Examinons quatre des interventions chirurgicales recommandées par le Shift.
Approche chirurgicale : cibler les principales sources d'émissions
§1 - Réduire les émissions liées aux médicaments
La première intervention consiste à attaquer les émissions à la source en ciblant les médicaments. Le Shift Project propose de conditionner la délivrance ou le renouvellement de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) à la publication du contenu carbone des médicaments. Si un médicament présente un contenu carbone trop élevé par rapport à une alternative équivalente, son AMM pourrait être refusée.
Pour aller plus loin, la relocalisation de la production de médicaments en France, où l'électricité est majoritairement décarbonée, pourrait également réduire significativement l'empreinte carbone. Cela est particulièrement pertinent pour les biomédicaments, dont la production nécessite des bioréacteurs et des procédés énergivores. Bien que la production en France présente des avantages écologiques, elle implique également un coût supérieur de 20 à 40 % par rapport aux alternatives internationales, ce qui nécessite un engagement fort en faveur de l'environnement.
Objectif : -47 % des émissions des achats de médicaments
§2 - Mettre en place une politique d'achat écoresponsable
La deuxième intervention vise à transformer les pratiques d'achat dans le secteur de la santé. Deux méthodes éprouvées sont proposées :
Intégrer l'empreinte carbone de chaque produit comme un critère déterminant dans les appels d'offres.
Former les acheteurs à l'application de ces nouveaux critères pour garantir des décisions plus durables.
Cette approche permettrait de réduire l'empreinte carbone des équipements et services de santé en favorisant des choix plus responsables.
Objectif : -47 % des émissions des achats de dispositifs médicaux
§3 - Optimiser les transports
Le troisième volet se concentre sur les transports, un secteur clé dans la réduction des émissions. Le Shift Project recommande la mise en place de plans de mobilité favorisant les véhicules électriques, le covoiturage, les transports en commun et le vélo. L'objectif est de réduire le nombre total de déplacements et l'emprise foncière liée aux parkings.
Cependant, une politique de transport spécifique au secteur de la santé est nécessaire. Les professionnels de santé, souvent confrontés à des horaires atypiques, ont besoin de solutions de transport adaptées et sécurisées (par exemple, pour les personnels féminins travaillant de nuit). Les patients, notamment ceux à mobilité réduite, nécessitent également des options de transport appropriées. En France, une grande partie de l'activité des taxis est liée aux trajets vers les hôpitaux et les établissements médico-sociaux, ce qui souligne l'importance de transformer ces pratiques vers des mobilités plus décarbonées.
Le développement de la télémédecine, particulièrement adapté aux consultations de suivi, est également une solution pour limiter les déplacements et réduire l'empreinte carbone associée.
Gain : -99 % en tenant compte de l’évolution des véhicules et particulièrement de l’électrification
§4 - Massifier la rénovation thermique des bâtiments
Enfin, la dernière intervention porte sur la rénovation thermique des bâtiments hospitaliers et médico-sociaux. Massifier ces rénovations est essentiel pour réduire les émissions liées au chauffage et à la climatisation, des postes de consommation énergétique majeurs dans ces structures. Cette initiative, souvent évoquée mais rarement mise en œuvre à grande échelle, doit devenir une priorité pour réussir la transition énergétique du secteur.
Gain : -75% des émissions associés à la consommation d'énergies, comme le gaz, le fuel ou l'électricité.
Approche systémique : Vers une décarbonation globale du secteur de la santé
Pour aller au-delà des interventions chirurgicales ciblées, le Shift Project propose une approche systémique, visant à transformer en profondeur le fonctionnement du secteur de la santé. Voici trois recommandations parmi les plus structurantes :
§1 - Faire évoluer la méthodologie en intégrant le Scope 3 dans le bilan carbone
La première recommandation est une évidence méthodologique : il est impératif que les structures de soins intègrent dans leur bilan carbone les émissions indirectes, dites de Scope 3, comme mentionné précédemment. Cette approche permettrait de prendre en compte l’ensemble des émissions générées par les activités en amont et en aval, offrant ainsi une vision plus complète de l'empreinte carbone du secteur.
§2 - Former les professionnels de santé à l’urgence climatique
La deuxième recommandation consiste à former les professionnels de santé aux enjeux de l'urgence climatique, à la transition vers une économie bas carbone, et à l’éco-conception des soins. Cette initiative est largement soutenue par la nouvelle génération : 84 % des étudiants en santé interrogés se déclarent favorables à une telle formation. En intégrant ces connaissances dans leur pratique quotidienne, les professionnels de santé pourront jouer un rôle clé dans la réduction des émissions du secteur.
§3 - Développer la recherche et renforcer le pilotage national
Enfin, la troisième recommandation est de renforcer la recherche sur la décarbonation et sur l’anticipation des impacts climatiques dans le secteur de la santé. Cela passerait par la mise en place d’un pilotage national fort, via une mission dédiée à l’énergie et au carbone en santé. Ce cadre national permettrait de coordonner les efforts, d’encourager l’innovation, et d'assurer que les objectifs de décarbonation soient atteints de manière cohérente à travers tout le pays.
L'application de ces mesures, qui nécessite une mobilisation conjointe des secteurs de l’énergie, des transports, de l’agriculture, de l’urbanisme et de l'industrie, pourrait permettre de réduire de 50 % les émissions du secteur de la santé par rapport à 2020. Bien que cet objectif soit ambitieux, il reste encore en deçà des 80 % de réduction nécessaires pour limiter les effets du changement climatique.
Pour aller encore plus loin : Une transformation profonde du système de santé
Atteindre une réduction de 80 % des émissions dans le secteur de la santé nécessite bien plus que des ajustements ponctuels. Cela demande une véritable transformation du système, fondée sur la promotion de la santé et la prévention, en accord avec l’adage « mieux vaut prévenir que guérir ».
Il est crucial de rappeler qu'une population en meilleure santé, avec moins de comorbidités, est plus résistante aux menaces infectieuses comme les super virus respiratoires. La prévention jouera un rôle central dans cette décarbonation en anticipant et en réduisant les futurs besoins de santé. Cela implique une action concertée sur des facteurs tels que l'alimentation, l'activité physique, et la réduction des addictions. Pour réussir, cette démarche doit mobiliser non seulement les professionnels de santé, mais aussi les collectivités, les entreprises et le tissu associatif.
Les auteurs du rapport insistent sur l’importance d’investir dans la santé et de considérer le « capital santé » individuel comme quelque chose à préserver, et non simplement à restaurer en cas de problème. L'objectif est de réduire le recours aux soins, un résultat qui ne pourra être pleinement mesuré que sur le long terme. Cette approche de « sobriété qualitative » soulève également une question essentielle : en France, sursoigne-t-on ?
Le débat sur l’efficacité et la pertinence des soins n’est pas nouveau. Plusieurs facteurs contribuent à cette tendance :
Le principe de précaution : Une approche qui pousse à « ratisser large » pour ne rien manquer.
Le mode de financement : Lorsque le financement est basé sur l’acte, il y a une incitation à multiplier les interventions pour rentabiliser l’équipement.
La relation médecin-patient : En France, 90 % des consultations se terminent par une prescription, contre seulement 45 % dans d’autres pays européens, où la santé globale n'est pourtant pas moins bonne.
Il est donc crucial d’évaluer la pertinence des soins, en tenant compte non seulement des résultats médicaux, mais aussi de leur impact environnemental, et donc, à long terme, de leur impact sur la santé.
Regard vers l’avenir : Le patient de 2050
Alors, à quoi ressemblera le patient de 2050 ? Bien que le patient du futur partage sans doute des similarités avec celui de 2022, il sera sans doute plus averti, notamment sur les questions de santé et d'environnement. Il pourrait être capable de gérer une partie de sa santé grâce à des technologies digitales, malgré les limites de ces dispositifs en termes de résilience.
Mais au-delà du patient, c'est l'ensemble de son environnement qui doit évoluer. Le patient de 2050 vivra dans des espaces urbains végétalisés, offrant des îlots de fraîcheur dans un climat plus chaud. Son alimentation sera locale, de saison, biologique, et plus végétale, ce qui l'aidera à prévenir les maladies chroniques liées à l'alimentation. L'air qu'il respira sera moins pollué, réduisant les risques de maladies respiratoires, de diabète de type 2, et même de certains cancers, comme le cancer du sein.
Le patient de 2050 saura reconnaître et transformer son environnement pour en faire un allié de sa santé, ne recourant aux services de soins que lorsque cela sera vraiment nécessaire.
Limites ou opportunités ? La crise du secteur de la santé à l’épreuve de la transition écologique
La situation actuelle de l'hôpital public soulève une question cruciale : la crise que traverse le système de santé compromet-elle sa transformation écologique, ou au contraire, ouvre-t-elle une opportunité pour un changement en profondeur ?
En réalité, c'est un peu des deux. Certains acteurs du secteur sanitaire et médico-social ont déjà engagé des initiatives en faveur de la transition écologique depuis plusieurs années. Cependant, la crise de l'attractivité dans les métiers du soin reste un obstacle majeur. Malgré les avancées technologiques et la digitalisation, les soignants restent au cœur du fonctionnement des établissements de santé. Leur pénurie, surtout dans les zones rurales, devient un véritable défi, parfois au point de devoir ouvrir des lignes aériennes spécifiques pour acheminer des médecins de grandes villes vers des zones moins accessibles.
Face à ce défi, certains voient l’écologie comme un enjeu supplémentaire qui s’ajoute aux urgences immédiates du soin. Ils estiment que la priorité doit rester la sécurité et le traitement des patients, et qu'il est difficile d'ajouter des préoccupations environnementales à une situation déjà tendue. Ce point de vue se comprend, notamment dans le contexte d'une crise hospitalière marquée.
Cependant, pour d'autres, la transition écologique représente une véritable opportunité. En effet, engager une démarche durable peut rendre le secteur de la santé plus attractif pour le personnel, améliorer la résilience des établissements, simplifier les chaînes d'approvisionnement, et dynamiser l'économie locale. De plus, cela permet de mettre en avant la prévention, souvent négligée faute de temps, mais essentielle pour un système de santé durable.
Sur le plan économique, l'isolation des bâtiments ou la modernisation des systèmes de chauffage ont déjà démontré leurs bénéfices financiers pour certains établissements. Quant à la performance médicale, une nouvelle forme de « Smart médecine » est en train d'émerger, qui cherche à concilier qualité des soins et réduction de l'empreinte environnementale. Les sociétés savantes discutent activement de ces questions pour mettre en place des pratiques médicales plus durables.
Ce sujet est désormais au cœur des préoccupations du ministère de la Santé et des établissements à travers la France. La prise de conscience est palpable, tant au niveau des directions hospitalières que des sociétés savantes, et des actions concrètes commencent à voir le jour.
L'implication croissante des acteurs du développement durable dans le secteur de la santé, y compris les industriels, marque un tournant. L'intégration des enjeux environnementaux dans la santé humaine n'est plus une simple option, mais une nécessité éthique et pratique pour l'avenir du système de santé.
Conclusion
La transformation du secteur de la santé vers un modèle plus durable et résilient n'est plus une option, mais une nécessité urgente. Pour maintenir le réchauffement climatique sous les 2°C, il est impératif de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 5 % par an, ce qui exige des actions coordonnées et ambitieuses. Le Shift Project nous montre la voie en proposant à la fois des interventions chirurgicales ciblées et une approche systémique pour atteindre cet objectif.
La décarbonisation du secteur de la santé constitue un impératif climatique, un enjeu de santé publique, et un facteur de résilience majeur. Pour résoudre le paradoxe d’un système de santé à la fois climaticide et vulnérable aux futurs chocs d’approvisionnement en énergie, il est crucial de se mettre au travail dès à présent.
Il est clair que la réussite de cette transition repose sur une transformation profonde, qui va bien au-delà de simples ajustements techniques. Cela implique de revoir les pratiques, de mobiliser l’ensemble des acteurs, et d’investir dans la prévention et la promotion de la santé. Il faut également répondre aux défis posés par la crise du secteur, en faisant de l’écologie non pas un fardeau supplémentaire, mais une véritable opportunité pour rendre le système de santé plus attractif, résilient et performant.
Les initiatives locales qui émergent déjà, les débats au sein des sociétés savantes, et la mobilisation croissante autour de ces enjeux montrent que la prise de conscience est bien réelle. Cependant, pour atteindre les 80 % de réduction d’émissions nécessaires, il faudra aller encore plus loin, en intégrant pleinement les enjeux environnementaux au cœur des stratégies de santé publique.
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Sources :🔗 Liens - Pour aller plus loin :
A lire :
La synthèse du rapport :
Présentation : Le document "Décarboner la santé pour soigner durablement" est une synthèse publiée par The Shift Project en novembre 2021, dans le cadre du Plan de Transformation de l'Économie Française (PTEF). Ce rapport présente une feuille de route pour réduire l'empreinte carbone du secteur de la santé en France, responsable de près de 8 % des émissions nationales de gaz à effet de serre.
Lien vers la synthèse du rapport : https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2021/11/TSP_Sante%CC%81_Synthe%CC%80se_DEF.pdf
Le rapport :
Présentation : Le rapport "Décarboner la santé" de The Shift Project, publié en novembre 2021, propose des stratégies pour réduire l'empreinte carbone du secteur de la santé en France, qui est responsable de près de 8 % des émissions nationales de gaz à effet de serre. Le rapport recommande une réduction annuelle de 5 % des émissions pour atteindre les objectifs climatiques d'ici 2050.
Il met l'accent sur l'importance d'inclure les émissions indirectes (Scope 3) dans les bilans carbone des établissements de santé, de former les professionnels aux enjeux climatiques, et de développer des politiques d'achat écoresponsables. Le rapport appelle à une transformation systémique du secteur, intégrant prévention et promotion de la santé, pour garantir un système de santé durable et résilient face aux défis climatiques.
Lien vers le rapport : https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2021/11/211125-TSP-PTEF-Rapport-final-Sante.pdf
Le livre : Le plan de transformation de l'économie française de The Shift Project - ISBN 978-2-7381-5426-2
A regarder :
La vidéo de présentation du rapport :
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