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Transition vers un voyage bas carbone

Voyager est un besoin humain fondamental, mais à quel prix pour la planète ?


Alors que les émissions de gaz à effet de serre continuent de grimper, le secteur des mobilités longue distance se retrouve au cœur du débat climatique. Mais est-il possible de continuer à explorer le monde tout en réduisant notre empreinte carbone ? Cet article, inspiré par le podcast très complet Time To Shift produit par Les Shifter,

vous dévoile les leviers clés pour transformer notre façon de voyager et atteindre un avenir où le déplacement rime avec durabilité.



Les trajets de plus de 100 kilomètres par voie routière ou de plus de 80 kilomètres à vol d'oiseau sont classés dans la catégorie des mobilités longues distances. Cette classification a été définie par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) lors de ses premières enquêtes sur la mobilité des Français dans les années 1980. Le Shift Project a récemment exploré ce domaine et, fidèle à son approche, a publié un rapport visant à transformer le secteur.

 

En termes d'impact carbone, ces mobilités longues distances sont significatives. Elles dépendent à 90 % de modes de transport à forte intensité carbone, générant ainsi 41 millions de tonnes d'équivalent CO2 par an, ce qui représente environ 7 % de l'empreinte carbone des Français. Cette situation s'explique par le fait que les trajets longs, en moyenne 7 600 kilomètres par an, sont majoritairement réalisés en voiture ou en avion. Pour atteindre l'objectif de neutralité carbone d'ici 2050, il est impératif que ces mobilités longues distances réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre de 5 % par an.

 

Pourquoi et comment décarboner les voyages longue distance ?

Pourquoi décarboner le secteur du voyage ?

Pourquoi nous engageons-nous dans des déplacements longue distance, que ce soit pour des raisons personnelles ou professionnelles ? La réponse est claire : environ 87 % des distances parcourues pour ces trajets sont motivées par des usages privés, principalement pour les vacances, les visites à des proches ou la participation à des événements tels que des mariages. Les 13 % restants sont liés à des activités professionnelles, qu'il s'agisse de navettes quotidiennes ou de déplacements ponctuels.

 

Comment décarboner le secteur du voyage ?

Comment réduire l'empreinte carbone de ces voyages longue distance ? Le Shift Project, tout en reconnaissant l'importance des technologies, reste réaliste quant à leur portée. Il est indéniable que les avancées technologiques joueront un rôle crucial dans cette transition. Parmi les innovations les plus prometteuses, l'électrification du parc de véhicules personnels occupe une place de choix. Il est essentiel de mettre sur le marché des voitures électriques économes et peu puissantes. Le Shift Project estime qu'à l'horizon 2050, cette transformation pourrait réduire d'environ 12,5 millions de tonnes d'équivalent CO2 les émissions liées aux mobilités longue distance, soit environ 30 % de l'effort nécessaire pour atteindre les objectifs de décarbonisation.

 

Outre l'électrification des véhicules terrestres, le secteur aérien pourrait également bénéficier de certaines avancées technologiques pour réduire son impact carbone. Il s'agit notamment du développement de carburants liquides décarbonés, tels que les biocarburants, et, à moyen terme, de l'hydrogène. D'autres mesures incluent l'optimisation des opérations au sol, la densification des cabines, la réorganisation des opérations en vol et le renouvellement des flottes pour intégrer les dernières innovations en matière d'efficacité énergétique. Tous ces aspects sont détaillés dans le rapport « Pouvoir voler en 2050 », publié par le Shift Project en collaboration avec le collectif Aéro de Carbone.

 

Cependant, ces avancées technologiques, bien que prometteuses, ne suffiront pas à elles seules. Le Shift Project estime que l'ensemble des solutions technologiques pourrait couvrir environ 55 % de l'effort de décarbonisation nécessaire pour les mobilités longue distance. Bien que ce soit encourageant, près de la moitié de l'effort reste à fournir. De plus, certaines de ces solutions impliquent des choix complexes concernant la production énergétique. Par exemple, les biocarburants destinés aux vols moyen-courrier sont issus de la biomasse, une ressource limitée en Europe et convoitée par d'autres secteurs tels que l'industrie, le chauffage résidentiel ou le transport fluvial de marchandises. La question de leur allocation entre les différents usages reste délicate.

 

De la même manière, en 2050, la production d'énergie électrique décarbonée sera contrainte par les capacités de production nucléaire et renouvelable. Faut-il alors se concentrer uniquement sur l'électrification des voitures, alors que celle-ci est deux fois moins efficace que le train en termes énergétiques, selon l'ADEME ? De plus, l'électrification massive du parc automobile mondial pourrait entraîner des tensions sur l'approvisionnement en métaux nécessaires à la production de batteries, tels que le lithium, le cobalt et le nickel, face à une demande mondiale croissante.

 

En résumé, compter exclusivement sur des solutions technologiques pour décarboner les voyages longue distance comporte des risques, des imprévus et des arbitrages complexes.

 

Comment adopter un voyage bas carbone : stratégies et solutions


Levier 1 : Transformer l'usage de la mobilité longue distance

Pour réussir la transition vers un voyage bas carbone, il est essentiel de repenser l'utilisation même des mobilités longue distance. Cette transformation repose sur un triptyque concret : la vitesse, la distance, et la fréquence. En d'autres termes, il s'agit de rendre plus attractifs les voyages plus lents, les séjours plus longs, et donc moins fréquents, ainsi que les destinations plus proches, notamment intra-européennes. Cette approche vise à réorienter nos usages dans une perspective écologique.

 

Gouvernance carbone du tourisme : un cadre pour la transition

Pour diffuser ces nouvelles pratiques, il est crucial de les partager avec tous les acteurs concernés. En ce qui concerne les voyages de loisirs, qui représentent une part importante des émissions carbone des mobilités longue distance, le Shift Project propose la mise en place d'une véritable gouvernance carbone du tourisme. Cette gouvernance serait structurée autour d'un ministère du Tourisme, responsable de la planification et de l'organisation du secteur face aux contraintes énergie-climat, et des régions, chargées d'adapter ces orientations aux contextes locaux. Les offices du tourisme, présents à une échelle très locale, joueraient un rôle clé en coordonnant la concertation entre les acteurs du terrain, en les accompagnant dans le déploiement de nouvelles offres et services, et en adaptant leurs pratiques, y compris par la formation des salariés aux enjeux énergie-climat.

 

Limiter les voyages longue distance : une nécessité environnementale

En ce qui concerne les voyages internationaux, bien que les déplacements longue distance ne représentent que 2 % des voyages, ils sont responsables d'un tiers des émissions. Le Shift Project propose donc de limiter progressivement les vols long-courrier, soit par la fiscalité, soit en contrôlant l'offre, ou par une combinaison des deux. Toutefois, cette démarche nécessite une attention particulière aux spécificités des départements et régions d'outre-mer, impliquant une concertation approfondie.

 

Promouvoir des voyages immersifs et durables

Par ailleurs, les acteurs de la gouvernance carbone, à savoir le ministère du Tourisme, les régions et les offices du tourisme, s'efforceront de promouvoir des voyages immersifs de longue durée, allant de plusieurs semaines à plusieurs mois, pour les Français souhaitant voyager à l'étranger. Inversement, il sera nécessaire d'adapter l'offre touristique en France pour accueillir des voyageurs étrangers sans voiture, en rendant ces nouvelles offres visibles et accessibles aux professionnels du tourisme, qui les relaieront ensuite aux touristes. Les établissements touristiques, les compagnies de transport, les animateurs d'activités, les plateformes de réservation et bien d'autres acteurs sont concernés.


Réguler la publicité : vers un nouveau récit du voyage

En complément de cette gouvernance, un autre aspect crucial à ne pas négliger est la publicité. Il s'agit de réguler la publicité afin de favoriser la diffusion de nouveaux récits sur le voyage, basés sur le triptyque de la sobriété carbone : vitesse, distance, et fréquence.

 

Réorganiser le travail pour soutenir la décarbonisation

Le Shift Project se penche également sur l'organisation du monde du travail, soulignant la nécessité pour les entreprises de réduire les déplacements grâce au numérique. De plus, il serait utile que le gouvernement et les syndicats explorent des solutions pour flexibiliser les congés, permettant ainsi des vacances plus rares mais plus longues, condition indispensable pour favoriser des voyages lointains, mais longs, lents et exceptionnels.

 

Levier 2 : Changer de moyen de transport

Un autre levier crucial pour atteindre un voyage bas carbone est de modifier notre choix de moyen de transport. À ce jour, le moyen de transport qui consomme le moins d’énergie et émet le moins de gaz à effet de serre est le train. Le Shift Project recommande, pour aller encore plus loin, de réaliser des investissements ciblés, notamment en électrifiant les lignes ferroviaires actuellement alimentées par des carburants fossiles. Toutefois, aujourd'hui, le train ne représente qu'environ 15 % des distances parcourues en mobilité longue distance. La question est donc : comment encourager l’adoption du train ?

 

Réseau ferroviaire : Concurrencer l’avion sur les moyennes distances

Pour rivaliser avec l'avion, le Shift Project propose une stratégie différenciée en fonction du concurrent. Pour réduire la domination de l’avion sur certaines distances moyennes, il est nécessaire d'investir dans un réseau renforcé de lignes à grande vitesse reliant les destinations européennes les plus attractives, notamment l'Espagne et l'Italie pour les Français. Des projets ambitieux, comme la création de liaisons transcontinentales de type Orient-Express, entre Londres et Istanbul par exemple, pourraient également être envisagés.

 

L’offre de trains de nuit doit également être augmentée pour rendre ces voyages plus pratiques, sans négliger le confort et la fiabilité, avec des options allant du luxe au low-cost pour séduire un large public. En parallèle, il est essentiel de s'attaquer aux pratiques aériennes les plus facilement remplaçables, notamment les vols domestiques. Le Shift Project propose de supprimer progressivement les vols intérieurs pour lesquels une alternative ferroviaire existe en moins de 4 heures 30, au lieu des 2 heures 30 actuellement prévues par la loi, avec certaines exceptions.

 

Concurrencer la voiture : Améliorer l’accessibilité et l’attractivité du train

Le second adversaire du train est la voiture, qui est appréciée pour sa simplicité, sa praticité et sa flexibilité. Pour rendre le train compétitif, il est crucial de combler les lacunes actuelles en renforçant certaines lignes existantes et en créant de nouvelles liaisons, comme la ligne Montpellier-Béziers, la LGV Bordeaux-Toulouse, ou encore une meilleure couverture de la région PACA. Le Shift Project recommande également de doubler la ligne grande vitesse Paris-Lyon par une nouvelle ligne reliant Orléans et Clermont, afin de desservir un plus grand nombre de gares avec les trains grandes lignes.

 

Pour rendre le train plus attractif, notamment pour les personnes à revenus modestes, une réduction de la TVA ou la création de tarifs sociaux pourrait être envisagée. Le prix reste un levier très efficace pour encourager l’usage du train. Par ailleurs, il est important de travailler sur le « dernier kilomètre », c’est-à-dire le trajet entre le point de départ et la gare, ainsi qu'entre la gare et la destination finale. L’efficacité des locomotives, notamment par l’électrification des lignes, est également un aspect à ne pas négliger.

 

Affaiblir la concurrence : Limiter l'usage des voitures et des avions

Pour réduire l’impact de la voiture, des mesures ciblées sur les usages les plus énergivores peuvent être adoptées. Le Shift Project propose par exemple de réintroduire une limitation de vitesse à 110 km/h sur toutes les autoroutes, une mesure bien connue pour son impact sur la consommation d'énergie.

 

Impact sur l'emploi : Une transition équilibrée

En ce qui concerne l’emploi, le Shift Project estime que les mesures proposées permettront de maintenir un équilibre global dans le secteur : les emplois supprimés dans l’aérien et l’automobile seraient compensés par la croissance du secteur ferroviaire.

 

Conclusion : Un plan d'action pour un avenir bas carbone


Pour décarboner la mobilité longue distance, il est essentiel de ne pas se reposer uniquement sur les évolutions technologiques. Miser exclusivement sur ces innovations augmente le risque qu'une partie importante de la population ne puisse plus voyager du tout dans les décennies à venir, en raison de la pénurie d'énergie ou de métaux, et du respect des plafonds d’émissions carbone. La mise en œuvre complète du plan d’action du Shift Project limite ce risque en intégrant une sobriété dans les pratiques les plus polluantes et en favorisant un report modal vers les transports les plus efficaces sur le plan énergétique. Le train, avec moins d’avions, des voitures plus lentes, davantage d’offres ferroviaires, et des technologies optimisées et électrifiées, constitue la recette proposée par le Shift Project pour réduire de 80 % l’empreinte carbone des mobilités longues d'ici 2050.


 

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Sources :🔗 Liens - Pour aller plus loin :


A lire :


  • Le rapport :

    • Présentation : Le rapport "Plan de Transformation de l'Économie Française : Mobilité Longue Distance" du Shift Project

      Ce rapport, faisant partie du Plan de Transformation de l'Économie Française (PTEF) élaboré par le Shift Project, se concentre sur la décarbonation des transports longue distance. Il propose des solutions pour réduire l'empreinte carbone des déplacements sur de longues distances, notamment en réorientant les choix de mobilité vers des alternatives plus durables. Le rapport aborde des sujets tels que l'optimisation des infrastructures existantes, le développement de nouvelles technologies, et la nécessité d'une gouvernance stratégique pour accompagner la transition. Ce document est essentiel pour comprendre les défis et les solutions liées à la mobilité longue distance dans un contexte de lutte contre le changement climatique.

    • Lien vers la synthèse du rapport : https://theshiftproject.org/plan-de-transformation-de-leconomie-francaise-mobilite-longue-distance/


  • Le livre : Le plan de transformation de l'économie française de The Shift Project - ISBN 978-2-7381-5426-2


A regarder :


  • La vidéo de présentation du rapport :




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